Le visage de nos colères

visage de nos colères

Les colères sont impossibles, car se mettre en colère ne se fait pas, cela n’est pas constructif, il faut pardonner et ne pas faire d’esclandres etc. Et si, au contraire, la colère méritait d’être exprimée et vous apportait bien plus ? Et si vous aviez une définition erronée de la colère ? Sophie Galabru nous dévoile les dessous des colères.

Un grand merci aux éditions Flammarion et à Babelio pour l’envoi de ce roman lors de la dernière masse critique non-fiction. Vous pouvez retrouver cet essai en librairie depuis le 16 février 2022.

Le thème

La couverture et le titre peuvent donner l’impression d’un roman. Il n’en est rien, voici le premier essai de Sophie Galabru, agrégée et docteur en philosophie. Elle donne une définition des colères qui vous aidera à y voir plus clair. Elle y aborde certaines colères auxquelles nous sommes tous confrontés au moins une fois dans nos vies. Des colères légitimes qu’il faut réapprendre à ressentir et à exprimer sans peur des autres.

“La colère fait peur ; elle impose de revoir ses convictions figées. Elle est épreuve de vérité avec soi et les autres. Elle demande du courage. Elle peut aussi rassurer ceux qui la ressentent lorsqu’elle se découvre partagée par d’autres qui vivent les mêmes injustices. Elle galvanise dans la manifestation collective.”

Page 252

Elle développe également la notion de pardon et l’exploitation qui en est faite par des tiers. Le pardon est un processus personnel qu’elle nous explique avec des exemples. De la définition à l’expression jusqu’au pardon.


Retour de lecture

Il s’agit donc d’un essai philosophique sur la colère et ses expressions. Sophie Galabru a su rendre ses propos accessibles au grand public. Si vous ne vous souvenez plus de vos cours de philo de terminale, ce n’est pas grave. Par contre, cela reste un essai philosophie. Elle aborde donc les colères sous cet angle à travers des exemples à la fois sociologiques, historiques, sociétales etc, et des réflexions d’autres philosophes qu’elle cite.

J’ai trouvé ça très intéressant de développer ce sujet. Je n’aborderai sans doute plus la colère de la même manière et la vivrai différemment. Un livre utile qui donnera un autre sens et une autre dimension à vos colères légitimes, n’en doutez pas.

Voici une infime partie des éléments que vous pourrez retrouver dans “le visage de nos colères” :

Faire profil bas

” La colère manquée n’est pas seulement le silence de la peur et de la soumission, de la sidération et du choc. Il est aussi des silences de lâcheté : se sentir coupable de rompre les bonnes manières ou des rapports faussement paisibles ; avoir honte de repousser ceux qui nous semblent fragiles mais qui nous saturent de leurs demandes ; craindre de blesser celui ou celle que l’on aime et qui dépasse nos limites ; redouter de surmonter le respect envers nos parents. L’injonction sociale à la bienséance a réglementé nos rapports jusque dans la malfaisance : il ne faut pas tout dire, même devant l’injure.”

Pages 28-29

Répondre par la colère à un client agressif, à un patron insultant… n’est pas possible pour des raisons économiques. Mais cela n’explique pas d’autres situations. Car il ne convient pas de s’énerver, il faut transformer cette colère en quelque chose de jugé positif. Il faut être “gentil”.

A cela se rajoute une réaction psychologique qui nous pousse à faire profil bas, ne pas envenimer la situation, s’en sortir au plus vite etc. C’est ce qu’on appelle le “figement ou la sidération” :

” mécanisme psychologique et physiologique par lequel on demeure incapable d’agir face à une attaque. Notre inertie peut encore participer d’une stratégie de conservation : ne pas faire d’éclat pour s’en sortir le mieux possible et au plus vite, ne pas engager de combat pour ne pas davantage le perdre. Anticiper l’agresseur et tenter de l’adoucir pour éviter que le coup ne soit plus fort.”

Page 28

C’est quoi la colère ? Pourquoi la brider et chez qui ?

Il ne faut pas confondre colère et haine. La seconde est une passion, une perte de contrôle de la raison, une envie de nuire à l’autre. Ne pas confondre non plus avec le caprice ou la frustration ou l’hystérie. Ces termes sont utilisés sur des catégories de personnes auxquelles on refuse le droit d’être en colère : les enfants, les femmes, certaines catégories sociales etc.

Pour les enfants : elle développe ce rapport à la colère chez l’enfant et comment la société ou la famille l’étouffe, comment elle est minimisée ou dévaluée, voire moquée (surtout chez l’adolescent.) Des techniques permettent de dévaluer la colère de l’enfant.

“L’impossibilité de l’enfant, voire l’adolescent, d’assumer une colère tient à une dépendance affective, économique, juridique et sociale.”

Page 112

” La colère est l’émotion – témoin d’une violence injustement subie et à laquelle l’enfant n’avait pas moyen de répondre, puisque l’adulte a coutume de dire à l’enfant ce qu’il doit ressentir ou non. Cette domination devient violence quand l’adulte enfreint le triple devoir de sécurité, d’affection et de considération. Si l’enfant parvient à se mettre en colère et à l’exprimer, il craint à raison de décevoir ses parents, de rompre un lien ou de l’abîmer. Accepter cette colère, pour l’adulte, c’est déconstruire les loyautés forcées par la dépendance, l’aveuglement de l’enfant espérant l’amour. Que l’adulte puisse l’assumer ne signifie pas qu’elle soit insensée et tardive, mais qu’elle mérite d’être vécue.”

Page 113

Dans le monde du travail : un certain type de management est étudié pour détourner votre colère. J’ai beaucoup aimé cette partie consacrée aux entreprises et aux jeux qu’elles proposent. Venant de la fonction publique j’y échappe encore mais plusieurs personnes de mon entourage doivent vivre avec dans le monde professionnel (je vais leur partager ces passages.)

Pour les autres : un essai qui nous offre une analyse philosophique des colères des citoyens face à l’oppression, face à des décisions d’Etat etc. tout au long de l’histoire de France (et parfois d’ailleurs.) Mais aussi la colère des femmes face à l’oppression qu’elles subissent parce qu’elles sont femmes.

Le conseil de la bibliothécaire

Sophie Galabru nous offre une analyse philosophique de l’expression de la colère et nous explique quand elle devient nécessaire. L’essai reste très accessible dans les notions qu’elle développe et les mots qu’elle emploie. Il ne s’agit pas du tout de développement personnel, mais il pourrait vous aider à mieux vivre vos colères en les comprenant et en les laissant s’exprimer quand il le faut.

Retrouvez le livre sur le site des éditions Flammarion : Le visage de nos colères

2 Réponses à “Le visage de nos colères”

  1. C’est très intéressant en effet, la colère, c’est normal de la ressentir de temps en temps mais notre éducation nous a bridé, on a appris que ce ressenti était mal et qu’il ne fallait pas l’exprimer surtout en société…autrement que par des mots, dire “je suis en colère parce que…” mais pas se montrer en colère ! Merci de nous en parler je l’ai vu dans la liste sur Babelio, mais moi j’ai eu le “Manuel de phytothérapie écoresponsable”, je le présenterai la semaine prochaine parce que je viens à peine de le terminer et souvent je prends un peu de recul avant de rédiger.

    1. C’est exactement ce dont elle parle dans son livre et c’est vraiment intéressant. J’ai vu “Manuel de phytothérapie écoresponsable” sur la liste Babelio également. Je serai curieuse de connaître ton retour. Merci pour tes messages.

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